(M) TAYLOR KINNEY - LIBRE/NEGOCIABLE.

Il est enfoncé dans son siège depuis maintenant quinze minutes, dévisageant la jeune femme en face de lui depuis un bon moment. Elle ne le regarde pas. Elle ne regarde personne. Il baisse le regard. C'est tellement frustrant d'être assis, de la voir ainsi et de ne rien pouvoir faire. Elle est comme une personne étrangère à elle-même.
Tellement absente.
Tellement éteinte.
Une coquille vide.
Vide, c'est le mot. Comme une impression qu'elle avait quitté son corps pour n'être plus qu'une simple enveloppe de chairs. Il finit par se redresser, posant ses coudes sur ses genoux, et relève la tête. « lila t'embrasse. c'est elle qui t'as envoyé le bouquet de fleurs là-bas. plutôt sympa. » lance-t-il, un sourire sur les lèvres. Vu la réputation qu'il a dans cette hôpital, pas sûr que quelqu'un ait une attention aussi sympathique à son égard. Ou alors ce serait sûrement un interne qui cherche à lui faire de la lèche. « j'ai guéri quelqu'un aujourd'hui, enfin j'ai plutôt rallongé sa vie. tu aurais vu comment sa femme était heureuse et comment elle m'a sauté dessus, c'était vraiment flippant. » rajoute-il, accompagné d'un rire. C'est ce qui lui fait aimer son boulot. Pouvoir lire le soulagement sur le visage de la famille d'un patient, être en quelque sorte un dieu le temps d'un instant. Simon scrute Sienna une nouvelle fois. Ses traits restent neutre, pas l'ombre d'une expression sur son visage. Il soupire bruyamment et se relève soudainement.  « c'est grotesque. » dit-il, secouant la tête de gauche à droite. « bordel, tu vas te mettre à parler Lyons?! » s'exclame-t-il, tapant un grand coup sur la table se trouvant en face d'elle. Elle tressaute, son regard vagabondant toujours au loin. « ça fait des semaines que j'me casse le cul à venir te voir pour décrocher ne serait-ce qu'un mot et toi tu continue de faire l'autruche. tu crois que ça m'amuses?! » continue-t-il, la pointant du doigt. Toujours rien. Il fulmine en la voyant tellement stoïque. « ouais, j'ai tué ta soeur, si ça peut te faire plaisir j'veux bien le dire même si c'est faux. mais si j't'avais écouter, elle serait encore un légume à l'heure qu'il est. Comme toi. Tu es un putain de légume Fitzgerald alors bouge ton cul et parle. » s'écrit-il. La bouche de Sienna s'ouvre et se ferme pour la première fois depuis des semaines. Elle veut parler, lui dire que c'est faux, mais rien ne sort. Finalement, sa langue vient taper contre ses dents. « monstre. » murmure-t-elle. « t-t'es un monstre. » finit-elle par dire, sans pour autant poser ses prunelles sur lui. Le visage de Simon change et ses traits si durs se mouvent pour lui donner un air surpris. Il ne s'attendait visiblement pas à ça. « docteur oswald! dans mon bureau. immédiatement. » peut-on entendre. Ce dernier se retourne. Dans l'encadrement de la porte, le chef de la chirurgie se tient, ayant assister à la scène.

Les yeux du chef se baladent instant sur lui, comme pour essayer de comprendre l'homme qui se trouve en face de lui. « j'étais tranquillement assis ici quand j'ai reçu l'appel d'un des psychologues de l'hôpital qui m'apprend qu'un de mes titulaires est en train de faire un scandale en psychiatrie. vous pouvez m'expliquer cela oswald? » demande le chef, avec un calme olympien. Eh bah voyons, un psychologue. De vrais collabos cela. Simon lève les yeux au ciel, comme pour montrer que l'exagération de la scène qui lui a été décrite. « ce n'était pas un scandale. j'ai juste voulu un peu la bousculer pour qu'elle sorte de son mutisme. ça a marché, vous en avez eu la preuve. » rétorque-t-il. Il aurait préféré qu'elle ne parle pas plutôt que de dire qu'il est un monstre. Ça le blesse venant d'elle. Qu'aurait-elle dit si le chef n'était pas intervenu?
Tu es un monstre.
Un meurtrier.
Vas-t-en, j'te déteste.
J'veux plus te voir.
Sûrement quelque chose dans le genre. Rien que d'y penser, ça l'énerve. Il n'est pas un monstre, encore moins un meurtrier. Il fait juste son travail, voilà tout.  « Sienna Lyons n'est pas votre patiente. vous n'avez pas à la traiter en temps que tel. » affirme-t-il. Simon baisse un instant les yeux. Il a raison, mais pourtant ça ne l'empêche pas de le faire et de recommencer s'il le faut. « je me suis beaucoup occupé de sa soeur lorsqu'elle était ici. il me paraît logique de faire de même avec elle. »  se contente-t-il de répondre. Le chef le dévisage un instant, s'enfonce dans son siège en croisant les bras. Rien de bon qu'il vaille. « quels sont vos relations avec cette patiente? » demande-t-il, d'un ton des plus sérieux. Simon se fige un instant. « pardon? » lance-t-il. Il a bien entendu, mais il surpris d'une question aussi directe. Le chef retire un instant ses lunettes, comme s'ils allaient se lancer dans un débat sans fin. « vous allez lui rendre visite tout les jours depuis qu'elle est ici, vous vous énervez du fait qu'elle ne retrouve pas la parole.vous êtes très... impliqué. alors je veux savoir si vous entretenez une relation amoureuse avec Sienna Lyons. » répète-t-il. Le titulaire reste un moment sonné, écoutant les remarques de son patron. A vrai dire, il ne sait même pas quoi répondre pour la simple et bonne raison qu'il n'arrive pas à mettre de mots sur le lien qu'ils ont.  « non! je... » balbutie-t-il. Il s'arrête en pensant à ce baiser qu'il lui a donné avant l'opération.
L'a-t-il fait pour l'apaiser?
L'a-t-il fait par envie?
L'a-t-il fait parce qu'il avait de la peine?
Il n'a pas envie de répondre à ça. Car dans un coin de sa tête, lui seul sait pourquoi il l'a fait et cela pourrait faire pas mal de dégâts. « vous êtes en train de franchir la ligne rouge Simon. jusqu'à nouvelle ordre, le pôle psychiatrique vous est interdit. » conclut-il, coupant court à tout ce foutoir.

"Sienna, c'est Oswald. ne te demande pas comment j'ai eu ton numéro, c'est bien assez compliqué pour que je te donne une réponse. j'aurais préféré entendre ta voix, toi sûrement pas mais... je tenais à m'excuser.  je... je pensais vraiment réussir à sauver ta soeur. je ne voulais pas que ça finisse comme ça, vraiment pas. avec mon envie de régler les problèmes, j'ai détruit sa vie et la tienne par la même occasion. j'ai ôté la mère à un enfant et je ne le voulais pas. j'en suis conscient et même pour toi je ne suis rien d'autre qu'un tueur, j'aurais voulu pouvoir discuter avec toi, te montrer que tu n'es pas la seule affecté par cela. alors je m'excuse encore, pour tout, pour le mal que je t'ai causé. pas pour le baiser. ça je ne m'excuserai jamais. j'me dis que dans d'autres circonstances on aurait peut-être... pu faire un bout de chemin ensemble. prend soin de toi Sienna. à un de ces jours."